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Je pense donc je blog

4 janvier 2005

Je pense donc je blog

Le 4 janvier 2005

Un grand plouf pour un petit blog.

Me voici en train de plonger dans le cybermonde, en songeant à Pascal  effrayé par "le silence" de "ces espaces infinis" : voilà que, cherchant peut-être à tromper le si commun mystère d'une banale existence humaine, comme il se doit tutoyée par les silences de l'infiniment grand et de l'infiment petit,  je me plais ce soir à imaginer le mystérieux destin d'une bouteille lancée à la mer infinie du cybermonde.

C'est tout à la fois l'émerveillement du Petit Prince et le courage chevaleresque de Don Quichotte qui m'étreignent. Les lettres de ce traitement de texte sont les moutons que je dessine dans  l'espace. Et ces lignes formées de suites de dos de moutons ont  aussitôt la prétention de parader de par le monde ! Il faudrait que je me raisonne et m'éloigne un peu de l'écran pour les voir telles qu'elles sont : une suite de bêtes électrons fonçant se fracasser vers de modernes moulins à vent à  la cybervitesse.

Mais quelle joie dans ce virtuel impact ! Comme c'est ici un blog de bonne foi, très virtuel lecteur, il faut  en effet que je te l'avoue :  misérable rédacteur de premières pages de journaux intimes restées orphelines, je  respire soudain un air nouveau et très pur dans ce blanc virtuel, où la question de savoir si ma pauvre prose tombera un jour sous les yeux de quiconque est réglée d'avance, de manière tout aussi virtuelle que certaine. Ici, pas de page à cacher lamentablement au fond d'un placard en se torturant à se demander si la vie serait bonne ou mauvaise fille de souffler à quiconque l'idée de pousser l'intrusion jusqu'à tourner la page de garde libellée "journal intime". Ici, d'emblée,  les coquetteries de mauvais auteur se rangent automatiquement dans la corbeille du traitement de texte. Les choses sont claires : je n'écris pour personne et pour tout le monde à la fois.

Voilà de quoi en rabattre de  toute prétention littéraire mal placée ou mal digérée. La satisfaction n'est pas mince à se dire qu'au moins, je n'encombrerai pas les corbeilles, bien réelles et bien débordantes celles-là, des éditeurs rassasiés de manuscrits et des librairies croulant sous les stocks d'invendus.  

Voilà de quoi aider à ordonner un peu plus le propos.

Et, merci à Cervantès de m'aider à  poser la question : "Lecteur oisif, tu pourras bien me croire sans serment : j'aurais voulu que ce [blog], comme fils de mon entendement, fût le plus beau, le plus hardi et le plus subtil qui se puisse imaginer. Mais je n'ai pu contrevenir à l'ordre de la nature [si elle a encore quelque chose à voir encore avec ce mode virtuel], qui veut qu'en elle chaque chose engendre sa pareille. Aussi, que pourrait donc engendrer un esprit stérile et mal cultivé comme le mien (...) ?".

La réponse est aussi simple que cela : je pense, donc je blog. Aussi  plate soit-elle, ma "pensée" revendique son blog. Elle le revendique avec la bonne conscience de ne s'imposer à personne,  si ce ne sont les très improbables oisifs qui auraient déjà poussé la lecture jusqu'ici.

C'est donc mon manifeste de ce 4 janvier 2005 : dépassée l'ultra-solitude, aussi banale qu'historiquement datée, de l'auteur d'essais avortés de journaux intimes aussi brefs qu'inintéressants  ! Le cybermonde offre le remède idéal : écrire à saute-moutons  au jour le jour et sans la moindre vergogne ce qui me passe par la tête en  pensant que la statistique est formelle : au petit bonheur la chance, il n'est pas possible d'exclure à des millions d'électrons de cela, un mot, ou qui sait même une idée, trouve, de part le monde réirrigué par le virtuel, une résonance. La dignité que l'on doit à l'universalité virtuelle aura au moins le mérite d'éviter dans l'insupportable pathos du dialogue avec soi-même...

Ce soir et pour toujours, me voici donc promu écrivain (de blog).

Ce qui, d'ailleurs, ne m'obligera pas plus à revenir ici que vers mes premières pages de journaux intimes avortés...

Jean Maïa

 

 

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